1949
Année des 35 ans, d’un grand voyage en Espagne avec Simone Favereau.
4 janvier. Carte postale à sa mère de Bordeaux. Écrit en toutes lettres « ma chère maman », au contraire des cartes précédentes qui ne mentionnait pas ce lien filial. « Simone Favereau m’a conduit chez son frère à Bordeaux où je suis depuis deux jours. » 19 janvier. Lettre à sa mère de Sèvres. « Je viens de rentrer de Bergerac à Sèvres où toutes tes lettres m’attendaient ! […] L’enveloppe jaune que tu m’as renvoyée contenait une fort gentille lettre de Corinna Bille, ainsi que d’anciennes photographies de moi qu’elle me rend. Elle aimerait venir avec ses enfants passer l’été au bord de la mer et me demande de la conseiller. Je retrouve mon affection pour elle. / J’ai passé, hier au soir, la veillée avec les Tardieu, chez eux, ainsi qu’avec Christiane de Coppet et Alix Guillain. […] Jean Tardieu va me faire à nouveau travailler à la radio où j’adapterai avec Pierre Courthion Toepffer. » 20 janvier. Carte postale à Gustave Roud. Conservée au CRLR.
Février. À Sèvres. Philippe Jaccottet habite ponctuellement chez lui ; il ne « s’installera » à Sèvres comme colocataire qu’en 1950. 26 février. Lettre dactylographiée à sa mère de Sèvres. « Je te remercie vivement pour l’envoi des illustrés qui me donnent un peu l’air du canton de Vaud. J’apprends, ainsi, avec soulagement, la mort de ta belle-sœur. Tu ne rencontreras plus et c’est heureux, ce gendarme, à la rue de Bourg. La famille Gavillet disparaît peu à peu et ce sont les Borgeaud les plus forts. Je crois que je regrette un peu que tu n’aies pas envoyé de banales condoléances, car rien n’est plus humiliant pour ceux qui veulent nous humilier que de paraître ne pas en tenir compte, du moins dans les manifestations de bienséance, mais cela n’a pas d’importance. / J’ai Philippe Jaccottet chez moi et j’en suis heureux, car Sèvres est bien un peu isolé et la présence d’un ami surtout comme celle de Philippe, est fort agréable. Il m’a dit, justement, que sa mère et toi, vous vous étiez toutes les deux liées d’une réelle amitié. Cette nouvelle me fait un vif plaisir, car tu ne peux savoir à quel point j’estime Madame Jaccottet ainsi que son mari. Voilà ce que j’appelle des amis cordiaux, généreux. Il paraît même que tu fais des travaux de broderie pour la famille ! Mon séjour, à Lausanne, t’aura au moins rapporté quelque chose sur ce plan là. / Mes affaires vont un peu mieux pour moi, à Paris. D’abord Christiane de Coppet (à présent Mme. Ch. Martin du Gard) m’a procuré un petit travail au “centre de recherches de politique étrangère” et grâce à elle, je gagne quelques sous pour mener une existence plus facile. Ce n’est pas le Pérou, mais mon livre sortira probablement chez Gallimard, la N.R.F., dans le courant de l’année. Tu verras mon nom aussi, dans une nouvelle revue “les Cahiers du Mois” dans laquelle je collaborerai régulièrement. Puis Jean Tardieu a décidé, plus tard, de me reprendre à la radiodiffusion. Enfin, si tous mes projets se réalisent, je serai tiré d’affaire. […] J’ai écrit un petit article sur la mort de Christian Bérard dans le numéro de mars de la “vie intellectuelle”, numéro qui va sortir dans une semaine et que je t’enverrai. J’ai vu Jean Cocteau à son retour de Suisse qui semble avoir un grand chagrin de la mort de son meilleur ami. A ce propos, je te remercie des papiers que tu m’as envoyés au sujet des conférences Cocteau-Bazin. Bazin garde un très bon souvenir de toi et aurait aimé te voir à sa conférence où tu airais pu entrer sans payer car son intention était de t’inviter, mais je ne lui avais pas donné ton numéro de téléphone pour ne pas que tu sois dans l’obligation de le recevoir et de faire des frais inutiles. Il a cherché dans l’annuaire du téléphone ton numéro, mais sous le nom de Borgeaud et naturellement devant le nombre, il a hésité à téléphoner. Il est allé ensuite faire un pélerinage à St. Saphorin, où il a vu Budry qui lui a parlé de moi avec beaucoup d’amitié et d’estime. / Marianne Oswald que je ne vois que par hasard est allée en Allemagne, à berlin, pour le compte d’un journal française dans lequel elle écrira une série d’articles qui, il faut le reconnaître, seront très bons. Son film va sortir à Paris et ce sera l’occasion d’une manifestation mondaine auquel peut-être, je participerai. Dans tous les cas, je vais participer mardi prochain, jour de mardi-gras, à une soirée au Club d’Essai où nous serons tous déguisés en personnages existentialistes de St. Germain des près. Je mettrai une culotte de velours, serrée par une ceinture, comme les Italiens, d’étoffe rouge et je mettrai une chemise à carreaux écossais ouverte et débraillée. Ce sera peut-être drôle. / J’ai eu la visite toujours charmante et pleine d’amitié de Bosshard et de sa femme. Il est même possible qu’après Philippe, touli [Bosshard] vienne vivre quelque temps seul, dans mon atelier pour préparer une exposition. Ce sera fort agréable. / Simone F[…] et Denyse Parrot n’iront pas en Suisse, leur nièce est malade et doit être un peu entourée. Mais il est possible que je retourne, dans le courant du mois de mai à Bergerac-Bordeaux-Arcachon. A Bordeaux, je donnerai une conférence sur la peinture suisse ou la poésie. J’ai le choix entre les deux sujets. / Puis cet été, vraisemblablement, je retournerai en Italie où, à Cortone, je serai chargé de faire le fichier de la bibliothèque française de la Commune. Enfin, cela n’est pas encore tout à fait au point. […] Denyse m’a donné un chat du nom de Sapajou, noir et blanc, fort joli et drôle. »
Mars. Sèvres.
2 mai. Carte postale à sa mère de Sèvres. « Ma chère Maman, je vais venir 3 jours à Lausanne (le 7 ct.) profitant de la voiture d’un ami et repartir très vite. Je pense arriver samedi prochain et rester jusqu’au mardi matin. » 19 mai. Lettre dactylographiée à sa mère de Sèvres. « J’aurais aimé t’écrire tout de suite après le retour de Philippe Jaccottet. Mais son retour a coïncidé avec mes émissions à la radio qu’il me fallait préparer minutieusement pour que Jean Tardieu soit encouragé à me reprendre. C’est fait ! Il est content, moi aussi. Je regrette que tu ne puisses les entendre, mais l’antenne n’est pas assez forte et ce ne sont que les environs de Paris qui peuvent l’écouter. L’émission s’appelle : comment on devient français. C’est en réalité une conversation à bâtons rompus avec un hongrois sur nos impressions sur Paris et le pays français. J’y raconte ce que je veux, avec un peu d’humour. Jean Tardieu m’a dit qu’il proposerait ces émissions à Sottens. Ainsi auras-tu une chance de les connaître ! / Mais je tarde à te remercier pour le paquet que tu as confié à Philippe. […] A propos de mon voyage, quelle déception pour moi de n’être pas venu ! Le camarade qui voulait me conduire en Suisse a d’ailleurs fort mal agi à mon égard. […] Comment vas-tu ? Les nouvelles que j’ai par Philippe semblent confirmer que tu ne vas pas trop mal. J’imagine que tu dois avoir des difficultés financières. C’est atroce et je connais ça à un degré excessif. La vie en France est revenue, mais à quel prix. Ce n’est plus 10.000 frs. par mois qu’il faut s’assurer, mais 20.000 frs. et naturellement je ne les ai pas. Jean Tardieu me donne 5.000 frs. par émission et j’en aurai deux par mois. Voilà 10.000 frs. trouvés. Le reste, je m’efforcerai de les avoir en écrivotant à gauche et à droite. A ce propos, René berger a accepté des petites notes sur mon voyage en Italie, notes écrites sous un titre général : Fiammifieri, ce qui veut dire allumettes. Le numéro de juin ou juillet les contiendra. J’ai averti Berger de t’envoyer à ton adresse ce numéro de “Pour l’art”. Daniel Simond a pris pour “Suisse contemporaine” un extrait de mon roman. Je ne sais quand il paraîtra, mais je pense très vite. Tu le verras certainement avant moi. Puis à Paris, j’ai publié un petit article sur les illustrateurs chez Jules Verne. Lorsque j’aurai reçu un exemplaire de la revue, je te l’enverrai. Tu vois par là que je travaille bien. Peut-être que Philippe te l’aura dit aussi. C’est très agréable de l’avoir avec moi, car il est un exemple de travail et m’entraîne beaucoup. Par-dessus le marché, c’est un compagnon gentil, discret et qui me rend, plus exactement partage avec moi les besognes de la maison. […] La chatte blanche, Micky, a fait le jour de Pâques 4 petits chats, dont 3 blancs et un gris cendré. Nous les avons tous gardés puisqu’ils sont nés le matin de Pâques. Il aurait été méchant, le jour de la Résurrection, de tuer ces bêtes. Des amis les prendront plus tard. Les blancs ressemblent tout à fait à “Fifre” que tu as connu. / Je vais tous les après-midi taper mon roman chez Madame S.P. Robert. Dans un mois, il sera terminé dans sa version définitive et je le donnerai en lecture à Gallimard. Quel travail ! Mais les amis à qui je le lis, le trouve très beau, écrit dans un excellent style et sur un ton très simple. Leur jugement m’encourage beaucoup. […] Je n’ai pas revu les Humeau depuis fort longtemps. J’ai même vis à vis d’eux du remords, mais depuis que je suis à Sèvres avec mon travail, je sors beaucoup moins. / Donne-moi un peu de tes nouvelles. J’ai été chagriné par la mort de Paul Budry. Si j’avais fait le voyage en Suisse, je serais tombé exactement pour assister à ses funérailles. Il paraît que Bosshard a été très frappé par la mort de son meilleur ami. Cette génération disparaît peu à peu, c’est triste. »
7 juin. Lettre dactylographiée à sa mère de Sèvres. « Si tu dois venir à Paris bientôt, je pense que nous pourrons rentrer ensemble en Suisse où si tout va bien je passerai pour aller en Italie, à moins que je ne parte avec Simone Favereau et Denise Parrot en Espagne. Mais ce sont des projets trop beaux pour qu’ils réussissent. Je continue à parler à la radio. Jean Tardieu est content de ces émissions qu comme j’ai dû te dire, sont des conversations spontanées sur la France. J’aime trop ce pays pour me trouver dans l’incapacité d’en dire quelque chose. On me fixe un sujet et je pars dans l’imagination. La prochaine émission sera sur les affiches de Paris. […] Je pars quelque[s] jours, 2 en réalité, pour Royaumont, dimanche prochain. C’est une vieille Abbaye loin de Paris, en ruine et où se passent des semaines musicales, littéraires. […] Je regrette bien la mort de Paul Budry qui est, qui était une figure sympathique du vaudois piccolant et d’esprit. Cette génération disparaît peu à peu, c’est terrible. » 9 juin. Carte postale à sa mère de Sèvres. « A Romainmôtier, Robert a exposé un portrait de moi. Peut-être auras-tu l’occasion de le voir. » 21 juin. Lettre à Pierre-Olivier Walzer de Sèvres. « Je sors de mon silence non pour t’annoncer une catastrophe mais pour te dire que je viens en Suisse vers la mi-juillet et que j’y passerai quelques jours de vacances chez Chappaz ou ailleurs. Je pense bien aborder Porrentruy et t’apporter la lettre de Claudel de main à main. Je suis fou de l’avoir vendue et tu vois la peine que j’ai à la lacher alors que je suis payé. Pardon. Pardon. / Vraiment, je viendrai à Porrentruy with letter and manuscrit du “Préau”. […] J’ai supplié Jaccottet de participer au concours de poésie décerné par Cocteau, Tardieu, Colette et Paulhan et du nom de “Prix du Palais-Royal”. Philippe faisait la moue. J’ai usé de toute mon influence. J’ai enlevé le morceau. Il est allé hier donné son manuscrit à mon ami Jean Tardieu à qui j’avais recommandé Jaccottet. Nous recevons à l’instant que Philippe est lauréat. Voilà encore quelqu’un qui me devra indirectement quelque chose pendant que je reste en arrière et dans les quinquonces. Je m’amuse. Je suis content. »
1er juillet. Lettre à sa mère de Sèvres. « J’aimerais beaucoup que tu passes quelques vacances avec moi ! Je pense aller à Bergerac vers la mi-juillet, puis de là, partir pour l’Italie où l’on m’attend, à Cortone. Mais rien n’est encore fixé. De toutes façons, je pars vers le 15 juillet pour quelque part car j’ai loué à Lélo Fiaux, peintre de Lausanne, mon atelier pour deux mois et demi. Elle s’installerait vers la mi-juillet. Philippe s’en ira vendredi prochain. Je suis rassuré à l’idée que quelqu’un habitera la maison car les vols de pavillons, l’été, est un sport courant dans la banlieue. Je loue 5.000 frs. par mois. Ce n’est pas excessif car la maison est plus confortable que l’année dernière. / A mon retour d’Italie, j’espère passer en Suisse quelque temps : En Valais, chez les Chappaz. Puis je te prendrai avec moi et tu viendras à Paris quelques semaines. […] Tu as vu dans les journaux le prix de Philippe ! Il le mérite par son talent bien sûr, mais, pratiquement, il me le doit car je l’ai forcé à concourir. J’ai parlé de lui à Tardieu qui est du jury et douze heures avant la proclamation du prix, Philippe portait son manuscrit à Cocteau, à Colette, à Tardieu. Enfin, je suis content et sa mère doit l’être. Quelle joie a-t-elle dû avoir ! […] Mon émission passera, cet automne, à la chaîne principale de Paris et tu pourras donc l’entendre à Lausanne. On l’aime et des auditeurs l’écoutent avec intérêt et nous écrivent. » 27 juillet. Lettre à sa mère de Bergerac. « La veille même de mon départ, j’enregistrai ma dernière émission. […] C’est pourquoi je n’ai pu que te faire ce petit signe d’Angerville où nous nous étions arrêtés pour boire un café. Le voyage fut magnifique malgré la chaleur et quelques pépins mécaniques. Depuis Angerville, nous avons suivi les bords de la Loire en passant par Cléry, Chambord, Blois, Amboise. Puis nous avons fait un arrêt de 48 heures dans la magnifique ville de Poitiers célèbre pour ses églises romanes. […] Tu sais que notre intention est de partir vers le 15 août pour l’Espagne. Nous avons des projets sensationnels. S’ils réussissent, nous prendrons l’itinéraire suivant : St. Sebastian, Bilbao, Santander, Burgos, Valladolid, Salamanque, Avila, Segovie, Eseurial, Madrid, Tolède, Cordoue, Séville, Grenade, Murcie, Valence, Alicante et Barcelone. Nous roulerions plus de 2000 kilomètres et notre séjour durera 4 semaines environ. […] Je crains fort la chaleur sur les routes de la Péninsule, mais Denyse prétend qu’à la mi-août, la chaleur diminue. nous avons de la chance d’avoir Denyse avec nous car elle parle fort bien la langue et nous aidera à prendre contact avec tous les don Quichotte. Après ce voyage en Espagne, je pense regagner non Paris tout de suite, mais me rendre en Suisse quelques jours en m’arrêtant à Chambéry, plus exactement à Randens, dans un château où je suis invité. Quelle chance ! Je te prendrai à Lausanne et nous rentrerons à Paris ensemble. Ce sera vers la fin septembre début octobre. Mais d’ici là tu auras de mes nouvelles. »
10 août. Carte postale à Gustave Roud de Brantôme. Conservée au CRLR. « Lorsque j’ai vu Brantôme entourée de fraîcheur, d’eau et d’arbres, j’ai pensé que vous faire un signe d’affection de ce lieu, convenait aux images que votre poésie entretient en moi. Pourquoi n’êtes-vous jamais avec moi. Dans dix jours, nous passerons la frontière espagnole et comme l’an dernier, à la fin de l’été, je sonnerai à votre porte. » 11 août. Dans un carnet intitulé : « Le Carnet d’Angerville et d’Ailleurs / Eté 1949 ». « Dordogne » « Angerville à midi. » « Je suis entré dans l’église pendant que mes compagnons buvaient leur menthe à l’eau. » « Lontemps suivi le bord de la Loire après Cléry, pélerinage désséché par l’histoire mais où une vieille femme est venue tirer la corde de l’angélus pour un village mort. » « Chambord ». « Amboise ». « Poitiers ». « Barbézieux ». « Bordeaux : ennui terrible. G. U. insupportable Démarches absurdes pour l’Espagne. Mais un soir nous raccompagnons J. C. à Portets et nous revenons le lendemain, l’après-midi. Depuis longtemps je n’avais plus eu de contact aussi doux, aussi heureux avec personne. » « Bergerac est le lieu de tout repos. On y mange, on y dort. Je suis heureux de cette loi toute simple mais parfois de grands remords me prennent d’avoir abandonné Le Préau. J’aspire davantage à la solitude qu’à me montrer, m’exposer. » « Brantôme 11 août 1949. » 15 août. Lettre à sa mère de Bergerac. « Ma chère Maman, nous partons tout à l’heure pour notre voyage espagnol. Notre première auberge sera Bordeaux où nous devons nous arrêter pour les derniers arrangements. » 17 août. Carnet : « Hendaye 17 août 1949 » ; « Nous arrivons à San Sebastien de nuit ». 18 août. Carnet : « Zarauz ». Même jour. Carte postale à sa mère de San Sebastián. « Nous partons à l’instant pour Bilbao. » 19 août. Carnet : « Santander le soir ». 20 août. Carnet : « Le village s’appelle Quintamilla-Escalada. » Même jour. Carte postale à sa mère de Burgos. 21 août. Carnet : « Burgos » 22 août. Carnet : « … et nous partons au matin du 22 août pour Valladolid en passant par Pallancia après avoir traversé Torquemada où je fais remplir mon outre d’un vin célèbre. » 23 août. Carnet : « Départ pour Salamanque ». Même jour. Carte postale à sa mère de Salamanca. 24 août. Carnet : « Salamanque-Avila » 25 août. Carnet : « Segovie » ; « L’Escorial ». 26 août. Carnet : « Départ pour Madrid ». 27 août. Carnet : « Je vais voir Carito qui nous invite le 27 au soir ». 28 août. Lettre à sa mère de Madrid. « Demain dimanche, je verrai ma première corrida. Nous venons d’aller prendre les billets. Je crois que le spectacle m’impressionnera beaucoup. » Même jour. Carnet : « … première corrida. Cruel jeu noble. Le défilé me prend aux entrailles. Plus tard l’émotion me fera trembler de tout mon corps. La novillada n’est pas extraordinaire à voir la réaction du public. » 29 août. Carnet : « Tolède ». 30 août. Carnet : « Départ pour la longue étape de Cordoue. » ; « Guadalquivir ». Même jour. Carte postale à sa mère de Cordoba. 31 août. Carnet : « Cordoue ».
1er septembre. Carnet : « Départ pour Séville ». 2 septembre. Carnet : « Journée à Séville ». 3 septembre. Carnet : « Départ pour Grenade. » 4 septembre. Carnet : « Visite de l’Alhambra ». 5 septembre. Carte postale à sa mère de Grenade. 6 septembre. Carnet : « Notre intention est d’atteindre Murcie, mais un accident nous arrête à Puerto-Cumbreras Nous sommes sauvés par miracle ! » 7 septembre. Carnet : « Nous repartons, atteignons Murcie en pleine fiesta. » 8 septembre. Carnet : « Départ de Valence après avoir assisté au tribunal des eaux de la huerta. » 9 septembre. Carnet : « Départ de Tortosa pour Barcelone ». 10 septembre. Carnet : « Barcelone immense, demi-français, espagnol. Ramblas animées. Retiens la Sagrada Familia et tout le style Gaudi. Elégance du Paseo del Gracia. Nourriture impossible à la pension, à vomir. » 11 septembre. Carnet : « Messe à la cathédrale. Cloître romantique avec peintres et oies. Nous partons pour la France l’après-midi à 2 heures. Traversons la frontière sans encombre au Perthus et arrivons à Perpignan le soir où nous dormons à l’hôtel du Chapon fin. Heureux de parler français. Le pays semble soigné comme l’impression que donne la Suisse après la France. Retour à mes origines. Heureux. » 12 septembre. Carnet : « depart pour Toulouse par Narbonne – Carcassonne » 27 septembre. Lettre à sa mère d’Aiguebelle (Savoie). « Depuis une semaine, je suis chez des amis près de Chambéry. Comme ils étaient sur mon chemin qui me rapprochait de la Suisse, je m’y suis arrêté volontiers. Je t’avertis que j’arriverai le 29 septembre (jeudi donc, après-demain) à Ouchy, venant d’Evian, au bateau de 18.50 heures. Je serais heureux si tu venais au port. »
21 octobre. Lettre à sa mère de Sèvres. « … départ de Lélo, pour le Maroc, remis au 26 octobre. Rentré à Sèvres samedi dernier, j’ai retrouvé la maison dans un assez pitoyable état et encombrée, surtout, de peintures, de matériel, de choses que je ne pouvais évidemment exiger de déblayer sur le champ d’autant plus que Lélo Fiaux m’a supplié de lui laisser le temps de souffler et de lui éviter à tous prix un déménagement d’une semaine dans un hôtel parisien avec plus de 60 toiles et un impressionnant barda de peintre. […] Notre voyage [de retour, après séjour en Suisse chez Ida] s’est bien passé avec Bugnin. Nous avons couché à Sens après un arrêt magnifique à Vézelay, par une journée d’automne très douce. »
4 décembre. Lettre à sa mère de Sèvres. « Ma chère Maman, je comprends, par ton silence, que tu es décidée à bouder longtemps parce que ton voyage à Paris n’a pas pu avoir lieu en octobre. Mes raisons étaient pourtant plus que valables, mais tu n’auras pas voulu y croire. Qu’y faire ? / Je te propose, si le cœur t’en dit, de venir à Bergerac pour la Noël comme je t’en avais parlé, sinon de venir à Sèvres qui ne manque pas de confort à présent. Pour Bergerac, j’attends tous les jours une confirmation. […] Mes affaires risquent, prochainement, de s’améliorer sensiblement. On me propose, par des voies indirectes, une collaboration à la “Gazette de Lausanne”. Je te tiendrai au courant. » 13 décembre. Lettre à sa mère de Sèvres. « Je ne sais pas si j’irai à Bergerac à Noël ! Comme Simone est fort passionnée à mon sujet, je ne voudrais pas alimenter un amour auquel je ne répondrai que fort mal. Mais j’ai peur de rester à Sèvres seul. […] J’ai eu la visite à Paris de Gilbert Rossa de Milan. Nous avons beaucoup rôdé dans Paris, dans une boîte de nuit appelée « Cupidon » où dansaient nues des femmes d’âges fort divers. Il y avait bien longtemps que je n’étais venu dans ces quartiers. On finit par vivre dans cet immense Paris comme des villageois dans la rue principale qui pour moi est St Germain des Prés. […] Hélène Magnenat m’a écrit deux fois. C’est amusant de voir que 15 ans après, et plus, nous nous retrouvions sur un autre plan. »